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Discours du 1er Mai 2023

Réécoutez le discours de Paul Magnette ce 1er mai à l'Eden, Charleroi, lors des festivités du 1er Mai du Parti Socialiste. 

Réécoutez le discours de Paul Magnette ce 1er mai à l'Eden, Charleroi, lors des festivités du 1er Mai du Parti Socialiste. 

Chères et chers Camarades,

C'est toujours un moment magnifique, un moment politique, un moment de convivialité et de fraternité. C'est très important que depuis 135 ans nous fêtions le travail, et que l'on n'oublie pas de le faire. Qu'on le fasse, qu'on revendique le fait que cette fête est notre fête, et la fête de toutes celles et tous ceux qui se battent vraiment pour les travailleuses et les travailleurs.

C'est l'occasion de remercier ceux qui donnent le meilleur d'eux-mêmes tous les jours. On entend souvent les actionnaires expliquer que c'est eux qui tirent la charrette. Il ne faut jamais oublier que la valeur, ce sont les travailleurs qui la créent, et les travailleurs uniquement. Il ne faut jamais oublier que si la société tient, c'est grâce aux travailleuses et aux travailleurs. Grâce à celles et ceux qui éduquent nos enfant, soignent nos aînés, prennent soin des malades, qui assurent l'ordre, la sécurité, qui entretiennent les espaces publics, les bâtiments, et beaucoup d'autres choses encore. Tous ces travailleurs, indépendants, salariés, ouvriers, qu'ils travaillent dans le secteur public, qu'ils soient dans le non-marchand ou dans le privé, tous contribuent à ce que la société tienne debout. Nous devons, et c'est le but d'un 1er Mai, leur dire du fond du coeur, merci pour tout ce qu'ils donnent au quotidien.

Le 1er Mai, c'est aussi l'occasion de rappeler que tout le monde n'est pas égal devant le travail. Vous entendez comme moi ces grands donneurs de leçons de la droite, nous expliquer que "il n'y a qu'à traverser la rue", que pour gagner plus il faut travailler plus, qu'il faut prendre les boulots qu'on vous propose, et tant pis si les horaires ne vous permettent pas de concilier la vie privée et la vie professionnelle, qu'il faut accepter les temps partiels, les horaires difficiles, etc. La plupart du temps, les gens qui tiennent ce genre de discours sont des gens qui ne savent pas ce qu'est le monde du travail. Ils ne connaissent pas la réalité du monde du travail. Des gens qui ont eu la chance de faire de belles études, et tant mieux pour eux. Des gens qui ont des positions de pouvoir élevées et tant mieux pour eux. Des gens qui ont des statuts et des rémunérations très confortables et tant mieux pour eux. Mais ils doivent arrêter de faire la leçon à des travailleurs qui n'ont pas leur chance. Des travailleuses et des travailleurs qui vivent dans des conditions beaucoup plus difficiles que les leurs. Ils pourraient au moins prendre le temps de lire quelques études. Des études internationales sont publiées tous les ans sur la réalité du monde du travail. Ce que ces études montrent, c'est que dans notre pays comme dans les pays voisins, un travailleur sur trois se dit heureux travail. Un travailleur sur trois se dit : "moi, je fais un travail utile, un travail qui a du sens, j'ai le temps de faire bien mon travail. J'ai le temps de discuter de mon travail avec mes collègues. J'ai un bon contrat, un bon statut, une rémunération correcte, je suis heureux dans mon travail et j'arrive à concilier ma vie personnelle et ma vie professionnelle". Et tant mieux, c'est ce qu'on souhaite à tout le monde. 
Mais si un travailleur sur trois est heureux dans son travail, ça veut dire que deux travailleurs sur trois ne sont pas forcément heureux dans leur travail, et que beaucoup de travailleurs continuent à faire l'expérience au quotidien de la souffrance au travail. 

D'abord de la souffrance physique, on n'en parle plus beaucoup aujourd'hui et quand on en parle on nous dit "on n'est plus au temps de Germinal". Mais pour beaucoup de travailleuses et de travailleurs aujourd'hui, les tâches sont encore des tâches physiquement pénibles avec des horaires difficiles, travailler très tôt, très tard, travailler la nuit, des horaires coupés, accepter des conditions de travail, des cadences éprouvantes pour le corps. 

L'année dernière, il y a eu en Belgique pas moins de 120.000 accidents de travail, et c'est un chiffre terrible qu'on ne cite jamais : il y a eu 95 personnes qui ont perdu la vie dans le travail. Dans des secteurs très durs comme le transport, la logistique, la construction, le travail use, le travail abîme, le travail malheureusement parfois tue encore. C'est une réalité quotidienne que ceux qui nous font de grands discours n'ont pas en tête.

Puis il y a toute la charge psychique du travail. Comme président, comme bourgmestre, je rencontre énormément de travailleurs dans tous les secteurs, c'est une grande chance. J'ai rencontré récemment des travailleuses en titres-services à Binche. Je rencontre des instituteurs, des institutrices à La Docherie, des travailleurs sociaux dans tous les secteurs et je suis frappé d’entendre combien me disent : "nous, dans notre travail au quotidien, on aide des gens qui vivent dans la maladie, sont confrontés à la mort, sont confrontés à la précarité, la solitude, à l'échec, au manque de confiance en eux et quand on rentre chez soi le soir, on ouvre la porte et on ne laisse pas ces soucis derrière la porte. Ces soucis des autres que l'on porte parce qu'on essaye de soigner la société, ces soucis on les porte avec nous sur nos épaules dans notre conscience et ça use, et certains finissent par s'effondrer". 

Il y a en Belgique aujourd'hui 500.000 personnes qui sont reconnues comme souffrant de maladie ou d'invalidité. Ce n'est pas un hasard. C'est parce que le travail est toujours pénible pour beaucoup de monde et parce que les charges physiques et psychiques ont continué de s'accroître pour énormément de travailleurs.

C'est ça aussi le 1er Mai : c'est rappeler que nous, socialistes, nous nous battons contre ça. Que nous, socialistes, nous nous battons pour continuer d'améliorer jour après jour la qualité du travail. 

Avec Christie à la Région wallonne, avec notre formidable vice-Premier ministre Pierre-Yves au fédéral, chaque fois que nous partons en négociations, c'est pour arracher des améliorations concrètes de la condition des travailleuses et des travailleurs. 
Avec Christie, on a sauvé 65.000 emplois APE, des emplois essentiels dans nos communes, dans nos CPAS, dans le monde du sport, de la culture, de l'associatif. Avec Christie, on a renforcé et amélioré les horaires et les conditions de travail et la formation des travailleuses en titres-services. On a fait un grand accord non-marchand : 260 millions, le plus grand accord que l'on ait fait depuis des années pour embaucher et améliorer les conditions de travail dans le non-marchand. On a renforcé toutes les filières de formation, y compris pour celles qui travaillent tout en étant en situation de handicap, et on met en place ici à Charleroi comme à beaucoup d'autres endroits des territoires zéro chômeurs pour aider les demandeurs d'emploi qui n'ont pas trouvé de travail depuis deux ans à retrouver une place dans la société et retrouver un vrai travail. 

Avec Pierre-Yves aussi, qui se bat comme un lion. En politique, rien n'est facile. Aucune fonction n'est facile à occuper. Mais si il y en a une qui est dure et ingrate et qui demande de la force, de l'énergie, c'est bien celle de vice-Premier ministre et notre brave Pierre-Yves qui est un homme de conviction, de courage, de travail, se bat tous les jours, seul, très seul, au sein du gouvernement pour défendre nos valeurs et arracher des conquêtes. En moins de trois ans, il a pu maintenir bec et ongles l'indexation automatique des salaires, qui était attaquée de toutes parts par les patrons. Il a obtenu grâce à la collaboration avec nos camarades de la FGTB et nos combats d'action commune la hausse du salaire minimum pour la première fois depuis douze ans. On a pu arracher également un vrai statut pour les travailleurs de l'économie de plateforme. Un vrai statut pour les artistes. Nous avons arraché un doublement du congé de paternité, un vrai droit à la déconnexion, et un vrai droit de formation de cinq jours pour tous les travailleurs. C'est Pierre-Yves et Pierre-Yves tout seul qui l'a arraché au sein du gouvernement. 

Ces conditions de travail, ces droits des travailleurs, nous devons continuer de les améliorer année après année et nous nous battre pour que ce qui existe soit maintenu. Rien n'est jamais acquis, et ce que nos parents, nos grands-parents ont arraché année après année, génération après génération, sera constamment attaqué par le patronat et par la droite. Nous devrons constamment les défendre. La résistance, protéger ce patrimoine formidable dont nous avons hérité des générations socialistes antérieures est une part essentielle de notre combat. Et je veux dire aux travailleuses et travailleurs de Delhaize que nous sommes totalement, complètement, inconditionnellement à leurs côtés. Nous avons été nombreux à leur rendre visite sur les piquets de grève et il en faut du courage ! Des semaines de grève sans être payé, devant les grandes surfaces à subir l'acrimonie des clients, l'agressivité des huissiers, à devoir tenir bon malgré le froid, malgré la pluie, malgré la fatigue et la lassitude, c'est un courage exemplaire. Nous sommes derrière eux parce qu'ils et elles se battent pour leur emploi, pour leur droit à leur rémunération, mais leur lutte est une lutte universelle. 
Derrière Delhaize, derrière le combat que mènent ces travailleuses et ces travailleurs, c'est un combat pour une certaine idée de la société. Une idée de la société dans laquelle on pense que l'humain doit passer avant le profit. Qu'une société qui fait des milliards de bénéfices, qui annonce qu'en franchisant et en réduisant l'impôt ils vont distribuer des dizaines de millions de dividendes supplémentaires l'année prochaine, une société dont le patron gagnait déjà plus de six millions d'euros par an et qui s'est encore augmenté, qui met sous pression les travailleurs, qui essaye de réduire l'emploi, réduire les droits, et qui attaque les libertés syndicales, ça jamais, nous socialistes, nous ne l'accepterons. Et nous serons demain comme aujourd'hui inconditionnellement derrière les travailleuses et travailleurs de Delhaize. 

Et puis, il faut aussi avoir le courage politique de dire qu'en tant que socialistes, on défend toutes les travailleuses et tous les travailleurs, y compris, ceux qui sont sans emploi. Ce n'est pas toujours facile quand on voit le discours ambiant, quand on voit le discours entretenu par la droite, le patronat, une certaine intelligentsia conservatrice qui attaque systématiquement les malades, les invalides, les chômeurs, les pensionnés considérés comme un coût insupportable pour la société. 
Nous, camarades, socialistes au gouvernement, nous avons relevé la pension minimum de + de 20%, nous avons relevé la pension de survie, nous avons relevé les revenus de remplacement pour les personnes en situation de handicap, nous avons relevé les allocations de chômage, nous avons relevé le revenu d'insertion et nous en sommes fiers, quoi qu'en pensent nos adversaires. Parce que vivre dans la pauvreté est un combat de tous les jours. Certains disent "on en fait trop pour les allocataires sociaux", mais qu'ils essayent de vivre un mois seulement avec 1300€ par mois, qu'ils essayent de voir ce que c'est quand on payé son loyer, ses factures, ses charges, de voir qu'il reste 10€ par jour pour payer tout le reste. La lutte contre la pauvreté au quotidien est une lutte extrêmement dure et non, on n'en fait pas trop, on en fait jamais trop dans la lutte contre la pauvreté. Ce sont des combats que nous continuerons toujours à mener, et nous les mènerons en nous battant aussi pour supprimer ce statut indigne de cohabitant qui conduit des femmes mais aussi des hommes à devoir dépendre de leur conjoint ou de leurs parents. De ne pas avoir des moyens propres pour vivre. Qui conduit des personnes qui aujourd'hui sont seules et qui par chance rencontrent l'amour, qui ont envie de s'établir avec la personne qu'elles aiment mais il leur est interdit de le faire sinon elles seront financièrement sanctionnées. Comment une société qui se dit humaniste peut-elle accepter ça ? Nous ne l'acceptons pas et la suppression du statut de cohabitant, de vrais droits pour tous, sera l'un de nos combats essentiels à l'avenir. 

En attendant, la grande bagarre, ça va être la justice fiscale. La justice sur les salaires. Cela ne va pas être simple parce qu'on est seuls au monde. Nos propositions, vous les connaissez : nous pensons qu'en Belgique, les travailleurs payent trop d'impôts parce que ceux qui détiennent du capital n'en payent pas assez. Tout le monde le dit, toutes les études internationales le disent. La Belgique est l'un des seuls pays au monde où les plus-values ne sont pas taxées. Les gens qui achètent et vendent des actions ne payent pas d'impôts dessus. C'est comme ça qu'ils accumulent des fortunes. 
En revanche, quand on travaille, on paye très vite 35 à 40% d'impôts sur le travail. Ca ne va pas. Notre proposition est simple : nous voulons baisser les impôts sur les bas et moyens salaires pour que la moitié environ des salariés de notre pays gagne 100 à 200€ en plus net tous les mois. Ca coûte à peu près 3 milliards, ces 3 milliards on sait parfaitement où aller les chercher. 

Dans ce gouvernement, les socialistes ont établi un impôt sur le capital, un impôt sur la fortune qui rapporte déjà 500 millions par an. On peut doubler le taux, et on a toute une série d'autres idées et notamment la taxation des plus-values pour aller rechercher l'argent nécessaire pour mieux rémunérer le travail de celles et ceux qui donnent aujourd'hui le meilleur d'eux-mêmes. 

Ce ne sera pas simple parce qu'on se heurte à une espèce d'offensive de la droite tous azimuts. Même le Premier ministre s'y est mis hier : Alexander De Croo nous le dit : "ce ne sont pas les millionnaires le problème en Belgique, le problème c'est les chômeurs qui ne veulent pas travailler et il faut les sanctionner". C'est toujours désagréable d'entendre un Premier ministre tenir ce genre de propos, c'est plutôt des propos qu'on attendrait dans la bouche du leader de la droite flamande. Quand on est Premier ministre, on n'oppose pas les travailleurs avec et sans emploi. Quand on est Premier ministre, on n'attaque pas ses partenaires de gouvernement. Quand on est Premier ministre, on se met au-dessus de la mêlée et on essaye de défendre l'intérêt général. Quand on est Premier ministre, on respecte l'accord de gouvernement. Ce point n'est pas dans l'accord de gouvernement, et donc nous n'en parlerons pas, punt aan de lijn

Nous, socialistes, nous voulons évidemment le plein-emploi. C'est nous qui avons fait inscrire dans l'accord de gouvernement l'objectif d'atteindre le plein-emploi, et on n'a jamais autant créé d'emplois dans ce pays que depuis qu'il y a un ministre socialiste du Travail : on a créé plus de 200.000 emplois. Evidemment, nous voulons le plein-emploi. On sait, nous, que le travail c'est ce qui donne du sens à l'existence, c'est ce qui permet de se construire une fierté, des liens sociaux, on sait que le travail c'est le socle des droits sociaux et de la protection sociale. On sait que dans une société où il y a du chômage de masse, un travailleur s'entendra toujours dire "si t'es pas content, tu peux y aller il y en a dix qui attendent derrière la porte et ils seront très contents de prendre ta place". Ce genre de pression est inacceptable.

Nous défendons le travail depuis 135 ans car on sait aussi que perdre son emploi, c'est souffrir d'anxiété, de solitude, de mal-être, c'est perdre confiance en soi. C'est sombrer dans la maladie ou voir s'aggraver une maladie dont on souffre déjà. Une étude a montré en France que le chômage tue chaque année 14.000 personnes, quatre fois plus que les accidents de la route. Alors oui, nous voulons plus que personne lutter contre le chômage et atteindre le plein-emploi.
Mais la meilleure manière de le faire, c'est d'augmenter les salaires si on veut rendre le travail attractif, ce n'est pas en affaiblissant et en rendant la vie encore plus difficile à ceux qui luttent chaque jour contre la pauvreté. C'est en les défendant mais dans le même temps, augmenter les salaires, les bas et moyens salaires, et pour ça faire payer ceux qui ont les moyens de le faire payer. 

La ficelle de la droite est un peu grosse, ça fait très longtemps qu'on entend ce discours : attaquer les chômeurs, faire croire que c'est votre voisin qui est sans emploi qui est responsable de votre situation, c'est la meilleure manière de protéger les millionnaires. Pourquoi est-ce que la droite ne veut pas d'une transparence bancaire complète ? Pourquoi est-ce qu'ils ne veulent pas d'un cadastre des fortunes ? Parce qu'ils savent très bien que si on l'établit, on ira chercher l'argent là où il est et le rendre à ceux qui le méritent, c'est-à-dire à ceux qui chaque jour créent la valeur et la cohésion sociale. 

C'est ça, chers Amis, chers Camarades, notre combat. 

Oui, chers Amis, chers Camarades, ce 1er Mai est un jour de fête et c'est important aussi la fête. C'est important ces moments de convivialité. Mener des combats, c'est dur, et on ne peut les mener que quand on se tient et quand on partage aussi des moments de joie et de fraternité ensemble. Nous allons en passer quelques-uns ensemble dans un moment. Nous allons chanter, écouter de la musique, nous embrasser, nous réjouir d'être ensemble. 
Mais dès demain, nous repartirons au combat, dès demain nous montrerons que la force socialiste est là, qu’elle est partout présente en Wallonie et à Bruxelles, qu'elle est au coeur des combats des travailleurs, qu'elle porte des valeurs qui en 135 ans n'ont pas pris une ride et qui demain encore triompheront.

Vive le travail, vive la fête du 1er Mai, et vive le socialisme ! 

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